Sculpture-récipient, Gelber Vogel,

1948

Margrit Linck-Daepp suit résolument sa propre voie stylistique, toujours exploratoire. L’oiseau jaune est emblématique de sa phase de création des années 1940, pendant laquelle l’artiste se consacre aux objets zoomorphes et anthropomorphes. Elle dirige une potière sur le tour à partir de ses dessins. La forme du vase qui en émerge se transforme dans les mains de Margrit Linck-Daepp en un oisillon plaintif, pour ne pas dire tyrannique, dont l’inaptitude à voler est soulignée par un centre de gravité bas. Le cou allongé s’achève par une petite tête, bec ouvert, pendant que les ailes grossièrement posées maintiennent le corps en équilibre. La céramiste dévoile, une fois de plus, le plaisir stupéfiant qu’elle éprouve à brouiller les formes lisses, qu’elle renouvelle avec d’autres récipients en les déformant, les pressant ou les écrasant avec virtuosité pour faire naître un objet inattendu. Au début des années 1920, Margrit Daepp étudie dans une école privée d’arts appliqués à Munich, séjourne à Berlin et Paris, où elle vit pendant trois ans après son union avec le sculpteur Walter Linck, et entretient des contacts étroits avec les surréalistes. Margrit Linck-Daepp se consacre alors exclusivement au dessin figuratif. À partir de 1930, sa céramique utilitaire renoue avec les formes de la poterie paysanne de Heimberg, puis la créatrice élabore rapidement sa propre syntaxe artistique, qui s’articule autour de la mutation et de la réduction. (Sabine Flaschberger)